Graveur sur Acier

28. Dossier pour la DAO

Depuis la nuit des temps, les graveurs ont dessiné à la main, avec des crayons, des plumes, des stylos-feutres… Ils ont toujours agrandi leurs dessins à l’aide d’un compas de proportion ou du système de petits carreaux…

J’ai été formé avec ces méthodes-là, vous n’avez qu’à regarder mes dessins de la pièce de 10 francs Génie de la Liberté, faits en avril et mai 1988.

À cette période, et depuis plusieurs mois, nous voyions arriver à la Monnaie des dessins proposés par des graphistes de l’extérieur, qui de plus en plus se servaient d’un ordinateur. Je n’étais pas du tout intéressé par cette technologie, mais mes deux garçons avaient leurs ordinateurs depuis plusieurs années à la maison, et ils m’ont conseillé de m’y mettre !

J’ai parlé de ce sujet au Patron, Monsieur Émile Rousseau, qui a émis un borborygme de doute, mais m’a chargé de monter un dossier pour argumenter ma demande. Je lui ai bien expliqué en quoi un ordinateur pourrait nous aider à résoudre plus facilement et plus rapidement des problèmes techniques, et seulement ceux-là.

Avec sa bénédiction, j’ai visité des salons, je suis allé voir des marchands d’ordinateurs, et surtout des utilisateurs… J’ai fait des comparaisons, et rapidement, le bilan a été sans appel : le seul matériel qui pouvait répondre à mes attentes était un ordinateur de type Macintosh.

Une fois mon dossier déposé auprès de l’Administration, je me suis heurté au veto de l’ingénieur en chef et de l’ingénieur informatique… Le Directeur a organisé une rencontre contradictoire, dont le Patron et moi sommes sortis grands vainqueurs ! Le matériel que je demandais étant beaucoup moins cher que celui que les ingénieurs voulaient choisir pour nous, ce ne fut pas un, mais deux ordinateurs qui furent livrés à l’atelier de gravure, avec scanner et imprimante.
Il a fallu alors que j’apprenne à maitriser ces engins, et ce ne fut pas une mince affaire, sachant que je ne pouvais surtout pas compter sur l’aide des ingénieurs.

En 30 ans, le matériel a considérablement évolué, surtout les logiciels : je n’oublie pas que j’ai débuté avec Illustrator-88, qui tenait sur deux disquettes…
Le premier scanner ne faisait que du noir et blanc et il fallait 2 ou 3 heures pour numériser un document qui n’était pas en haute résolution. Les « erreurs système » étaient fréquentes, les « plantages » de fichiers aussi.
Il m’a fallu plusieurs mois pour arriver à des résultats satisfaisants, et beaucoup d’acharnement.

Maintenant, je vais être très précis : on ne dessine pas avec un ordinateur, on s’aide d’un ordinateur pour mettre au point ses dessins. DAO veut dire « dessin assisté par ordinateur ». Je continue à crayonner comme avant, à chercher mes idées sur un carnet de dessin comme avant, et tant que mon projet n’est pas mûr dans mon esprit, je ne passe pas à l’ordinateur ! Ça ne servirait à rien…
La DAO permet de mettre au point plus vite ses projets, de les modifier plus vite, de faire des dessins plus précis, de faire des présentations plus soignées.

Je n’ai pas retrouvé l’argumentaire écrit pour ce dossier, mais heureusement, six planches de dessins ont échappé à la poubelle ! Je vous les offre. Il y a quelques inédits parmi eux.
Jean-Luc Maréchal.

Trente ans plus tard, je suis toujours un fervent adepte du Mac, et surtout, je dessine toujours beaucoup à la main !

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